Intervention au séminaire "Lettre et journal" (AIRE) le 31 mars 2006, publiée dans le n° 32 d'Epistolaire, Revue de l'A.I.R.E., 2006.

Au jour d’aujourd’hui

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1er janvier 2004

 
Il ne faut pas commencer une année sans projets, même modestes. Depuis longtemps j’envisage de faire une petite recherche sur la datation des journaux. Et, du coup, sur la datation en général. Sans doute cela existe-t-il déjà. J’imagine qu’au moins pour les lettres, la chose a été étudiée, puisqu’avec la signature et l’adresse, la date en est un élément essentiel. Allons droit au but : le journal moderne ne devient vraiment lui-même que le jour où il rejoint la lettre sur ce point, et où la date passe du domaine de l’énoncé à celui de l’énonciation. Je m’explique. Dans une lettre, ou un acte juridique, la date non seulement désigne, mais certifie le moment de l’énonciation : c’est aujourd’hui tel jour, parfois telle heure, que je suis en train de t’écrire, ou bien : c’est aujourd’hui tel jour que nous concluons ce contrat. Cela est important pour la lecture de la lettre, pour l’exécution du contrat. C’est un pacte de vérité : antidater une lettre ou un contrat est une tricherie. Or pendant longtemps les personnes qui ont tenu des livres de raison, des livres de famille, des chroniques, et même des journaux, ont été assez indifférentes à la date à laquelle elles écrivaient, et n’ont guère eu souci d’en informer leur lecteur. Seule comptait la date des événements racontés. Lisez le sieur de Gouberville (1522-1578), « Le sabmedi XIIIe, je ne bougé de céans. Dès le matin, Cantepye alla aulx plés à Barfleu », ou Pierre de l’Estoile (1546-1611), « Le mardi 28e de ce mesme mois, Jour des Innocens, tout plain de Gens passans après le Roi qui venoit d’en sortir, au Bacq de l’isle S. Denis, furent noiés… », ou Héroard (1551-1628) : « Le XIIe sapmedy, esveillé a sept heures après minuict… » (il s’agit du petit Louis, futur Louis XIII, trois ans et demi, dont Héroard tient la chronique). La date est intégrée dans le récit, on parle de ce qui s’est peut-être passé trois heures avant comme si ça datait de trois siècles. Tout est au passé historique. D’où la difficulté, pour cette littérature de la fin du Moyen Âge et du début des temps modernes, de distinguer entre histoire, mémoires, chroniques, livres de raison et journaux. Conséquence : on dit les faits, on ne les commente guère. Les émotions, quand on les note, sont déjà à distance. « Je fus en colère » est une information – alors que « je suis en colère » serait… une colère ! Quand la date concerne seulement l’énoncé, la pédale sourde est mise à l’énonciation, même si le chroniqueur emploie la première personne, qui n’est encore qu’une forme sèche. En revanche, isoler en tête la date pour marquer le moment de l’écriture, c’est un geste capital, qui dégage l’énonciateur de son récit, ouvre la voie à une personnalisation de son propos. Ce n’est pas tout à fait pareil d’écrire : « Le mardi matin 9 septembre… », ou « À la gloire de Dieu ce mardi matin 9 septembre… », comme le fait, le 9 septembre 1642, Jean-Jacques Olier (1608-1657), datant la prière écrite par laquelle il entame son « entrée » du jour. Un pas de plus, et la date sera isolée du texte. Tout cela est délicat à analyser : il faudra regarder, en série, beaucoup de textes des XVIe, XVIIe, XVIIIe siècles, et le faire en détail. Il n’y aura pas une coupure nette, mais des transitions, des mélanges, des discordances entre des pratiques contemporaines, des retards, des innovations. Ce geste, qui nous semble si simple, d’écrire pour soi, après avoir mis la date : « aujourd’hui », est une conquête. Ça nous semble naturel, ce ne l’est pas. D’une manière plus générale, on peut dire que c’est seulement à partir de la seconde moitié du XVIIIe siècle que le rapport que les gens ont au temps vécu commence à ressembler au nôtre. Il n’y a pas toujours eu des horloges dans les maisons, ni des montres au poignet des gens, pour leur faire mesurer l’usage de leur temps. Ni des agendas pour planifier leur avenir (l’agenda apparaît au milieu du XVIIIe siècle). D’ailleurs, pour faire des agendas, il faut l’imprimerie. Pour écrire sur un cahier, il faut du papier. Peut-on dire, comme le fait Alain Girard (Le Journal intime, 1963, p. 7) : « À toutes les époques et de plus nombreux à mesure que se répand l’instruction, des hommes se servent ainsi de l’encre et du papier » ? Le papier, inventé en Chine, n’est arrivé en Europe qu’à partir du XIVe siècle : comment faisait-on avant ? On n’avait pour écrire, dans la vie quotidienne, que des tablettes de cire, lourdes, indiscrètes, éphémères : s’il y eut jamais des journaux personnels dans l’Antiquité ou au Moyen Âge, ils ont tous fondu avec la cire qui les portait, on n’en a retrouvé aucun. Aujourd’hui, 1er janvier 2004, il neige à Fontenay-aux-Roses, j’écris ceci sur l’écran de mon ordinateur, mais c’est sur du bon papier, grâce à la Faute à Rousseau, que vous atteindra, teinté de considérations hautement philosophiques, et dûment daté, ce petit projet de recherche sur la datation. Et maintenant, au travail !


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 3 octobre 2005

En train vers Grenoble. La date

 

Mon étude sur la date devrait analyser, pour le journal, le passage du régime de la chronique ou du livre de comptes, où seule compte, finalement, la date de l’événement rapporté, et non la date de l’écriture…

[si bien que le régime d’écriture de ces textes est souvent à deux étages : prises de notes cursives, qu’on jette après les avoir mises au net, notes qui ne sont sans doute pas « datées » elles-mêmes de leur date d’écriture, date qui, étant relativement proche des événements, est considérée comme sans intérêt, allant de soi, l’important étant la date des faits : et l’on va trouver ce système, sans doute à des degrés divers, chez les chroniqueurs (voir la préface de Léonard Michon), chez ceux qui tiennent des livres de raison proches ou non du journal (cf. ce que dit René Favier du premier cahier du journal mi-financier, mi-érotique, de Pierre-Philippe Candy), chez Louis XVI, et chez la plupart des témoins et chroniqueurs des guerres de la Révolution et de l’Empire : pour tous, il n’y a aucun fétichisme de l’écriture immédiate et de la trace de l’instant, si bien que, alors que ces cas se prêteraient à une étude génétique minimum, de telles études sont impossibles, les notes originales ayant toujours disparu. Les différents « livres » de la comptabilité commerciale donnent néanmoins une image codifiée de telles étapes, puisque, dans mon souvenir, il y a le « brouillard » (c’est-à-dire brouillon) qui enregistre en vrac dans l’ordre toutes les opérations effectuées (donc une sorte de « boîte noire » qui fait foi parce qu’elle a été écrite sur le moment et qui prend valeur de trace) et une série d’autres registres où les mêmes opérations, recopiées, sont redistribuées et classées, distinction capitale. Gardait-on les brouillards ? En tout cas, il y a là une institutionnalisation des phases successives, alors que, dans les activités que je vais décrire (chroniques, puis « carnets de route » des soldats), cela reste implicite et invisible. J’ai été frappé, lors que mon exploration à la BNF le 30 septembre dernier, de voir que presque tous les prétendus « journaux de route » des soldats de l’Empire étaient en fait de simples chroniques, rangées dans l’ordre des dates des événements, reconstituées souvent très longtemps après, à partir de notes aujourd’hui disparues, et qu’on affichait cela sans scrupule : tout le monde s’en fichait, cela ne compromettait en rien la crédibilité des récits]

… au régime de la lettre où la date d’écriture devient capitale…

[utiliser à ce sujet les notes prises sur Louis Odier : à l’intérieur du texte, il signale parfois entre parenthèses la date d’écriture réelle d’une entrée concernant un jour en réalité déjà dépassé, « rattrapage » assez amusant, à cheval entre les deux systèmes : il aurait pu sauter carrément les jours « chômés » et les « rattraper » à l’intérieur de l’entrée du jour d’écriture (subordonnant la date des faits à la date d’écriture), mais comme il vit encore dans la forme de la chronique, il accorde une énorme importance à la continuité du calendrier, et fait l’inverse – ce qui montre néanmoins qu’il se sent coupable d’une sorte de mensonge, qu’il tient à rectifier – il est à cheval entre les deux systèmes, ne peut plus s’empêcher de dire la date d’écriture, par honnêteté, mais ne peut pas encore lui donner la position hiérarchiquement dominante [exemplier, 2] ; je pourrais trouver d’autres situations à la même époque, en particulier le passage parallèle, passionnant, où Azaïs se met en garde lui-même contre la tricherie qui consiste à continuer plusieurs jours d’écrire sous la même date, manifestant par ce scrupule que la date d’écriture est devenue pour lui plus importante que tout – ce qui est d’autant plus remarquable que les entrées en question sont tout à fait débrayées par rapport à des dates de faits, puisqu’il s’agit uniquement d’idées [exemplier, 6]. (Analyser aussi la distinction très claire que Rétif fait entre la date des faits et la date d’écriture dans Mes inscripcions).

Ce sujet est si intéressant que je puis vraiment le prendre pour le séminaire du mois de mars.

Et, pour continuer, prendre, toujours à la même époque, l’exemple de l’invention ludique du mot « heural » par la correspondante de Benjamin Constant [exemplier, 4] – mais voir s’il s’agit du contenu (une description minutieuse de l’emploi du temps de la journée, mais dressé rétrospectivement) ou de l’énonciation, fragmentée et datée… comme l’est par exemple, presque minute par minute, le journal du 31 décembre 2003 de Mathieu François du Bertrand (Le Beau Danube bleu, Éd. Bénévent, 2005).

Idée d’un titre : « Au jour d’aujourd’hui ». On arrive à Grenoble, il est 11 h 28.


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23 novembre 2005

Dans le train Paris-Lyon

 
On est en réalité le vendredi 25 novembre, il est 6 h 05 du matin, je ne dors pas (exceptionnel) et j’en profite pour mettre au net mes notes d’avant-hier, dont l’original, sur un bloc-notes, à l’encre rouge, va partir à la poubelle – car je n’emporte jamais mon ordinateur dans le train – système d’écriture et de copiage qui me rapproche des livres de raison et de Louis XVI.

Je recopie telles quelles ces notes, même si elles sont sur certains points redondantes (Odier). Après avoir terminé, j’avais écrit en tête : « A suivre, capital ». Elles le sont, capitales, en particulier sur le rapport à la signature. Mais ce ne sont que des amorces.

Notées dans le train Paris-Lyon, ces idées m’ont été inspirées par le colloque de Limoges sur les écrits du for privé, en particulier la communication de Sylvie Mouysset sur la signature des livres de raison.

« Au jour d’aujourd’hui »

Dater l’écriture

- 2 modèles :

- Liaison entre la date et la signature : il ne peut pas y avoir de datation du moment de l’écriture sans identification simultanée de l’auteur de l’écriture.

Point « évident » – mais capital et à examiner en détail – même si l’identité est collective, elle finit par être représentée « ès qualité » par quelqu’un de particulier.

Prendre pour preuve de cette intime liaison l’infirmité, l’insuffisance de ces signes quand ils sont disjoints :
    -  dater sans signer
    - 
signer sans dater

Et quand on date, ce qu’on date, c’est sa signature autant que la chose signée.

Nœud capital.

Défaire son évidence.


Dans le train Paris-Lyon
Ce mercredi 23 novembre 05 à 7 h 51
Ph. L.

Le lieu est moins important que la date, puisque c’est seulement en passant ci-dessus, par jeu, à l’acte, qu’instinctivement j’ai localisé ma signature : je n’avais pas pensé à tout cela avant.

Ouvrir un dossier à élastique sur « Au jour d’aujourd’hui » et commencer à y rassembler exemples et références biblio.

Problème du « rattrapage » dans le journal (dernier écho de la pratique courante de l’écriture rétrospective dans les livres de raison et chroniques – exemples de rattrapage dans le journal de Louis Odier : il aurait pu rattraper sans le dire, le geste nouveau est de signaler (donc dater) l’acte de rattrapage).

Problème inverse du datage interne dans les lettres qui se transforment en journal (retrouver la correspondance de Constant avec Mme de Charrière et l’expression « heural »).

Reprendre tout cela, en particulier à partir du livre de Béatrice Fraenkel sur la signature ; à partir de livres sur la comptabilité ; à partir d’une histoire de l’enregistrement administratif et juridique, si cela existe. - Regarder aussi les livres de linguistique de l’énonciation sur l’autoréférentialité – les déictiques et leurs référents.

Autre idée de titre (moins bonne) : le pacte chronographique (ou autochronographique).

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Mercredi 29 mars 2006, 9 h

 

Impression que mon sujet de recherche est ténu, fragile, marginal par rapport au thème du séminaire (les épistoliers vont être déçus) et que ma recherche elle-même est à peine ébauchée, écartelée entre deux pistes, l’une théorique (une analyse de pragmatique, pour laquelle je ne suis peut-être pas le mieux armé, mais qui me semble manquer – peu ou pas de pragmatique de la date), l’autre historique (les origines du journal du XVIe au XVIIIe siècle, jamais étudiées de ce point de vue, et peu connues – parler de mon projet).

Faire un exemplier, en précisant qu’il donne juste une gamme de cas pour raisonner, sans prétendre tracer une histoire.

Expliquer vendredi ma petite affaire, et tenir le soir même un journal de ce qui m’aura été objecté ou suggéré.

9 h 15

Ce matin, je ne dormais pas et roulais dans ma tête, dans tous les sens, ces histoires de pragmatique.

L’épistolier qui met la date envoie sa lettre : il ne verra jamais cette date en série avec celles de ses lettres précédentes – ou suivantes – et cette date identifie un objet unique et distinct ; les dates qui font pour lui série sont plutôt celles des lettres qu’il a reçues. Et ces dates participent à un dialogue de dates. Il y a des attentes, des négligences, des paresses, des silences, des croisements.

Le diariste, lui, a sous les yeux, sur le même support, en série, toutes les dates, et les problèmes de continuité ou de régularité que leur suite pose. Pas d’autre dialogue qu’avec le temps lui-même. Les dates peuvent avoir le caractère aléatoire et dispersé des faits notés. Elles peuvent être liées à une règle d’écriture, la plus répandue étant l’obligation quotidienne, avec (et là, je retrouve mon problème) deux variantes possibles, d’énoncé ou d’énonciation : dire quelque chose sur chaque jour (même si c’est après), dire quelque chose chaque jour (même si ce n’est pas sur le jour).

Mais pour l’épistolier comme pour le diariste, la date d’écriture se trouve donc le plus souvent liée à une règle morale (relationnelle ou intime).

9 h 50

Dater le moment de l’écriture, je le fais depuis une heure à la main, de manière un peu artificieuse, ponctuant (et distinguant) par un coup d’œil sur ma montre les étapes de ma réflexion. L’ordinateur pourrait le faire à ma place. Histoire à écrire des enregistrements mécaniques qui « font foi ». Il y a eu d’abord le timbrage et le compostage des lettres (qui certifiaient la date et le lieu, non d’écriture, mais d’envoi, mais du coup garantissaient que la lettre avait été écrite avant). Il y a maintenant la datation informatique, qui a envahi non seulement nos ordinateurs, mais toute la société, puisque beaucoup de nos actes (qui ne sont pas en général des actes d’écriture, mais de paiement) sont enregistrés à la seconde près, souvent à notre insu. Sur mon ordinateur, en tout cas, je n’ai plus besoin de dater mes actes d’écriture, ça se fait tout seul. Et si je me trompe, ou que je triche, la machine rectifiera, ou démentira.

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Jeudi 30 mars 2006, 10 h 

Mon sujet « ténu », c’est donc le passage de la date de la troisième à la première personne, dans le journal. Sujet diffus plutôt que ténu. Justement, il n’y a pas de « date », au sens de « tournant » : c’est un déplacement progressif, l’apparition de nouvelles pratiques qui s’ajoutent aux anciennes sans les faire disparaître.

Je pourrais en montrer l’amorce très ancienne dans le rituel d’ouverture ou de clôture d’un certain nombre de livres de raison : la date y est proclamé à la première personne : « Moi, Untel, aujourd’hui, Date, je commence (ou finis) ce livre pour telle ou telle raison ». Dans le livre lui-même, les dates sont « à la troisième personne » (même si la première personne y est employée, les dates renvoient aux choses énoncées, non à leur énonciation) [exemplier, 1].

Je pourrais aussi montrer la « révolution » (inconnue à l’époque – ce n’est que d’aujourd’hui que nous relions des phénomènes qui s’ignoraient entre eux) apportée par Rétif de la Bretonne [exemplier, 3] : il a fait de « la date à la première personne » un genre littéraire autonome, des sortes de « haïkus » (la date, plus un mot ou un nom) incompréhensibles à tout autre qu’à l’énonciateur, fondant le moment de l’écriture et le moment écrit, et programmant sa réécriture au retour annuel de la date. Résumer les trois phases du processus : a) la pratique d’inscription de dates (qui transforme cette date en « lettre à soi-même dans l’avenir », puisque le « moi futur » devra « répondre » ; b) l’autobiographie de cette pratique menée dans un récit de loin en loin daté comme un journal (Mes inscripcions) ; c) quand le récit rattrape le moment présent (4 novembre 1785), l’autobiographie s’évanouit et la fonction journal vient au premier plan, la pratique jusque-là « racontée » des dates (à partir d’un présent se penchant sur le passé) devenant une pratique « racontante » d’un présent daté tendu vers l’avenir…

L’exemple de Rétif devrait, mieux que tout autre, montrer ce qui rattache le système de la date dans le journal moderne à l’épistolaire : l’entrée dans un espace dialogique. La date d’une lettre suppose un implicite et préalable « Je t’écris » ; celle du journal, dans le cas de Rétif, et de beaucoup d’intimistes dans la suite des temps, un « Je m’écris » ou un « Je m/t’écris », si je puis dire. La date d’énonciation suppose l’émergence, en même temps que de l’énonciateur, d’un destinataire (externe ou interne). Ces divagations ténues sur la date rejoignent donc l’autre pan de mes divagations, déjà publiées dans Un journal à soi, sur l’émergence de la « lettre à soi-même » et de la personnalisation du support (« Cher papier »). Si le journal devient peu à peu « intime » dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, c’est en rejoignant le système d’énonciation de la lettre, mais aussi en en détournant… l’esprit par l’intériorisation du destinataire.

Je vais donner un autre exemple – apparemment anecdotique, mais toutes ces choses « ténues » dessinent un même paysage. C’est la pratique de copier ses lettres avant de les envoyer. Internet rend maintenant automatique ce qui était jadis un choix, et demandait un effort. Copier une lettre, c’est lui ajouter un nouveau destinataire : soi-même (et traîtreusement, jadis, sans le dire au premier destinataire : c’étaient des « copies cachées »). Copier ses lettres, c’est tenir un journal de sa correspondance. C’est réunir en un même corpus des lettres adressées à des correspondants différents, en fonction de l’unité de leur source. La lettre copiée ne va donc pas seulement être articulée virtuellement avec la correspondance reçue de chaque destinataire, mais elle dessine un portrait de l’épistolier, de lui seul connu (puisqu’à chaque destinataire échappent les lettres écrites à d’autres) et à lui seul destiné (constituant des archives personnelles, qu’on doit rarement faire lire à autrui dans leur globalité). Existe-t-il une histoire de la pratique des copies de lettres ? Sans doute, et mes épitrologues de demain me renseigneront. Les « lettres » littéraires de l’Antiquité étaient en fait des œuvres, mais j’imagine que dans les temps modernes, ça a d’abord été une pratique administrative, passée de là aux particuliers les plus notables, ou les plus lettrés, puis entrée dans les mœurs de scripteurs plus ordinaires – je ne parle pas d’un Rousseau, qui garde soigneusement copie des billets qu’il envoie à Mme d’Épinay ou Diderot au moment de leur brouille, mais je vois qu’un gentil garçon qui n’est brouillé avec personne, Louis Odier, dix-huit ans, renvoie couramment dans son journal à sa correspondance active, bien classée, qui en devient une sorte d’appendice [exemplier, 2].

Le séminaire ayant pour sujet les échanges entre lettre et journal, je puis montrer comment le journal devient « intime » en investissant le système d’énonciation de la lettre, mais aussi comment la lettre, par une sorte de retour, peut entrer dans la logique du journal par la fragmentation interne (datée, ou « heurée ») de l’énonciation d’un même envoi. Les épistoliers emploient souvent le mot « journal » pour désigner le récit de la vie quotidienne, quand il est fait de manière régulière ou détaillée. On peut penser que la lettre devient elle-même journal à partir du moment où une même lettre distingue en les datant plusieurs moments d’énonciation. C’est ce qu’on voit par exemple dans les lettres que Constant adresse  en 1788 de Brunswick à Isabelle de Charrière (parfois plus de dix « entrées » sous-datées dans une même lettre). Est-ce la lettre qui a commencé ce genre de fragmentation, ou le journal ? La lettre sans doute. Mais le plus impressionnant, c’est quand, à l’intérieur même d’une lettre ou d’une entrée de journal, l’énonciation colle au présent immédiat, annonce qu’elle va s’arrêter et reprend en disant ce qui s’est passé depuis l’arrêt : le réel s’introduit au cœur du texte même, dans une sorte de dialogisme avec le hors-texte – qui se trouve du coup virtuellement textualisé. Cela paraît tout simple, enfantin, et c’est une petite révolution, une brèche dans la continuité narrative : l’avenir, sous nos yeux, entre deux phrases, bascule dans le passé. En donner deux exemples : Rétif, fragment 700, et ma chère Lucile, mercredi 8 juillet 1788, 2 h de l’après-midi… [exemplier, 3 et 5]

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6

Jeudi 30 mars 2006, 23 h

J’ai fini mon exemplier.

Il resterait bien des pistes à signaler. Celle de mes débuts de recherches sur les almanachs et agendas. Celle des journaux spirituels, etc. Il faudrait que je reprenne, avec cette clef de la pragmatique, des corpus que j’ai commencé à explorer, comme celui du 14 juillet. Ajouter à l’exemplier une bibliographie.

Que vais-je dire demain ? Un journal de travail est, par écrit, une manière souple de faire entrer un lecteur dans l’aventure d’une recherche – mais est-ce, oralement, une bonne méthode d’exposition ? Demain, il faudra que je ferme ces notes, que je regarde loin devant moi et que je me lance – souhaitons que l’inspiration vienne ! Il faudrait au moins que je me trace un canevas…

J’ai un faible pour le journal de recherche. Samedi dernier, à Nantes, j’ai fait un exposé sur mes propres journaux de recherche, exposé que j’ai préparé en temps limité, de 7 h 30 à 9 h 51, dans le TGV Paris-Nantes, sous la forme d’un journal de voyage que je leur ai tout simplement… lu et commenté. En le préparant, je suis tombé sur une « note », soyons sincère, bien intéressante, de mon texte « Sincérité » (1994), que je recopie ici :

29 octobre 1994

Me revoilà plus tôt que prévu. C’est l’urgence. Qui vous dit d’ailleurs qu’on est vraiment le 29 octobre ? La date, c’est un effet de sincérité. Ça vous fait une belle jambe. La chose est-elle plus vraie d’avoir été pensée un samedi, et par moi ? Mais il est vrai que je l’ai pensée un samedi. Quelle chose ? Je ne sais plus. À demain.

Eh bien ça, c’est un mot de la fin : à demain, justement ! Je vous dirai ce qui se sera passé…

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7

Samedi 1er avril 2006, 8 h

Aujourd’hui, on est après-demain, et demain, c’était hier : je fus paresseux. Je lus tout simplement ce journal, en commentant l’exemplier. Au fond de la salle, mon ami Michel Longuet, dessinateur et diariste, m’avait promis de prendre des notes pendant la discussion, ce qu’il fit. Une dizaine d’interventions, suscitantes, sympathiques.

Non, personne ne m’indiqua une « pragmatique » de la date, ou  une étude centrée sur la datation et ses effets. À défaut, l’idée me vint que le problème était sans doute abordé, sous l’angle pratique, dans les Parfaits secrétaires et autres manuels littéraires ou commerciaux. Merci à Geneviève Haroche qui me fit, le soir même, autour d’un délicieux tiramisu, une biblio express. Autre idée : cette pragmatique de la date existe peut-être en anglais, en allemand ?... Lancer un appel sur la liste de discussion « IABA ». Sortir du champ francophone : le problème est universel. À suivre.

Je feuillette le cahier de Michel.

Chapelain recopiait ses lettres en substituant consciencieusement à la date du brouillon celle de la mise au propre (Bernard Bray)… On appelait « date », jadis, aussi bien le lieu que le moment d’écriture d’une lettre (José-Luis Diaz)… Gide et Léautaud ont signalé dans leur journal même, comme mon charmant Louis Odier, les entorses qu’ils faisaient à sa datation (Michel Braud)… Les jeunes diaristes russes voyageant en Europe au XIXe siècle titubaient entre calendrier orthodoxe et calendrier grégorien (Catherine Viollet)… Dans le journal, la date sert moins à informer un destinataire qu’à rendre sensibles les écarts entre les entrées, en somme le rythme (Brigitte Galtier)…

Oui, chère Odile Pauchet-Richard, le souci moral enrobe toute date, fait penser au lien avec la religion, et regarder vers les protestants, la Suisse, Calvin et l’industrie horlogère… Mais la base est la comptabilité « vénitienne », apparue au XVe siècle, grâce aux débuts de l’industrie du papier. Livres de comptes et livres de bord sont de toutes les religions, mais il est très vrai que les protestants ont plus vite individualisé et intériorisé ces techniques de contrôle – ce qui explique qu’un bon catholique (si je puis dire) comme Diderot, écrivant à Sophie Volland le 14 juillet 1762, ait pu découvrir l’Amérique en lui présentant comme presque impossible une pratique de journal qui existait depuis plus d’un siècle déjà en Angleterre…

Oui, enfin, cher José-Luis Diaz, absolument : la date elle-même est neutre, c’est son articulation (explicite ou implicite) dans le discours qui la fait basculer du côté de l’énoncé ou de l’énonciation. Basculons donc. Il est maintenant 9 h 08, ce samedi 1er avril, ce n’est pas un poisson, mon ordinateur fait foi, et je clos ici ce journal qui vient juste, au compteur, d’excéder les 25000 signes demandés, espaces… et temps compris.


Exemples

 
1        Jean Beausire (1651-1743)

Journal 1738-1740
, inédit
BHVP ms 1323

Début

1738
Au nom de dieu cette feuil a esté commancée
au Jour d’huy lundy 20me octobre
mil sept trante huit pour former
mon Journal en nottes de certaines affaires
que je treuve a propos dy inscrire

Fin

Ce Journal a finy ce jour d’huy
Mardi au soir 26 jeanvier 1740

 2        Louis Odier (1748-1817)

Journal, inédit
Bibliothèque publique et universitaire, Genève

[Disjonction affichée entre la date de l’énoncé et la date d’énonciation (16-24 juillet 1767)]

 Jeudi 16. Ici ma paresse cause encore une interruption à mon journal. Une visite assez longue à Made Dehuc au sujet de son cadet, et l’arrivée de Paquet avec Mrs Roux, Gourjon et Devillas Cadet, voilà tout ce que ma mémoire me fournit d’intéressant pour ce jour-là (J’écris du 19).

 [On a donc de brèves entrées de rattrapage pour les 16, 17 et 18. Le 19, après son rattrapage, il fait sa vraie entrée du jour ; mais…]

20. Autre interruption de paresse (j’écris ceci du 24).

[Il résume vite le 20 juillet puis écrit : « Je ne dis rien du 21 et 22. Je ne me rappelle pas qu’il soit arrivé ces jours-là rien de mémorable ». Puis il résume le 23 et fait son entrée du 24 correctement en une page.]

 
3     Nicolas Rétif de la Bretonne (1734-1806)

 J’avais pour but principal de me ménager des anniversaires, goût que j’ai eu toute ma vie, et qui sera sans doute le dernier qui s’éteindra. L’avenir est pour moi un gouffre profond, effrayant, que je n’ose sonder ; mais je fais comme les gens qui craignent l’eau ; j’y jette une pierre : c’est un événement qui m’arrive actuellement ; je l’écris, puis j’ajoute : « Que penserai-je dans un an, à pareil jour, à pareille heure ?… » Cette pensée me chatouille ; j’en suis le développement toute l’année ; et comme presque tous les jours sont des anniversaires de quelque trait noté, toutes les journées amènent une jouissance nouvelle. Je me dis : « M’y voilà donc, à cet avenir dont je n’aurais osé soulever le voile, quand je l’aurais pu ! il est présent ; je le vois ; tout à l’heure il sera le passé, comme le fait qui me paraissait l’annoncer ! ». Je savoure le présent, ensuite je me reporte vers le passé ; je jouis de ce qui est comme de ce qui n’est plus ; et si mon âme est dans une disposition convenable (ce qui n’arrive pas toujours), je jette dans l’avenir une nouvelle pierre, que le fleuve du temps doit, en s’écoulant, laisser à sec à son tour… Voilà quelle est la raison de mes dates, toujours exactes dans mes cahiers, et de celles que je fais encore tous les jours.

Monsieur Nicolas, Pléiade, I, 480-481

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[4-5 novembre 1785]

551. 4 9b (Aujourd’hui), j’en suis parvenu ici, pour le relevé de mes Inscriptions : j’ai pensé, cette nuit, à mettre à la suite de cet ouvrage, un détail de mes infirmités. Je continuerai, désormais, à écrire, jour par jour, tout ce qui m’arrivera, jusqu’à la fin de ma vie. J’emporte, aujourd’hui, ce papier dans ma chambre de la rue Saint-Jacques, afin qu’il ne soit pas vu…

552. 5 9b. Hier soir, chez M. de Toustain, où j’ai su que ma femme était de concert avec le vil Augé ; elle a lu par admiration la lettre de ce monstre à sa femme. Je n’ai rien écrit ce matin ; je me suis levé pour aller à l’imprimerie, faire ôter le nom de Guillot du frontispice du II volume des Françaises, pour le montrer à Maisonneuve, qui n’a pas voulu imprimer cet ouvrage : j’ai ensuite vu Guillot, et j’ai donné l’ordre à l’imprimeur de se faire donner les 3734 livres en billets, par ce libraire : feuille B IId volume, le soir.

[20 avril 1786]

 700. 20 ap. Cinquième anniversaire de la date 20 aprilis cum Sarâ in hac insulâ. Matin, 5 pages qui finissent la Dissipée. A l’imprimerie, remanié la correction des Statuts, Parisiennes. Granger, relu 2 de i ; je vais dîner chés M. Beaumarchais.

J’ai été dîner. Beaumarchais était chés M. de la Reynière père. Le fils est furieux dans son exil, à ce que m’a conté Mme de Villers. J’ai causé avec Eugénie, qui m’a montré ses  Métamorfes d’Ovide. J’ai lu mon article de Figaro et laissé mon prospectus du Contradicteur.

Mes inscripcions
éd. par Paul Cottin, 1889, p. 127-128 et 191

 

 

4         Benjamin Constant (1767-1830)         

Lettres à Isabelle de Charrière

 

[4 mars 1788]

 

J’ai pris le parti d’avoir toujours une lettre commencée, que je continue, sans ordre, et où je verse, jusqu’au jour du courrier, tout ce que j’ai besoin de vous dire, tantôt une demi-phrase, tantôt une longue dissertation, n’importe : pourvu que j’écrive à celle avec qui j’ai été si heureux deux courts mois, c’est assez.

 

[16 mars 1788, matin]

 C'est après-demain seulement que vous recevrez ma première lettre. J'attends ce jour avec
impatience, et toujours en me reprochant bien vivement de ne vous avoir rien écrit plus tôt. Je
n'imaginais pas quelle monstrueuse lacune l'omission de deux courriers faisait à deux cent cinquante lieues l'un de l'autre. Si vous avez voulu, vous avez pu vous venger bien cruellement. Avant le 3 (si vous ne m'avez pas écrit avant la réception de ma lettre), je n'ai rien à espérer de vous. Je vous avouerai que je trouve bien un peu dur que vous ayez passé tout d'un coup du charmant heural à une correspondance ordinaire, et que vous ne commenciez vos lettres qu'en recevant les miennes et pour les faire partir tout de suite.

Isabelle de Charrière, Œuvres complètes, tome III,
Genève, Slatkine, 1981, tome III, pp. 55 et 70



5      
Lucile Desmoulins (1770-1794)

Journal 1788-1793, Ed. des Cendres, 1995, p. 136-137 [7-9 juillet 1788]

Mardi 7. Je n'ai point sorti de la matinée. Nous avons été nous promener au Parc. Il pleuvait bien fort, nous nous sommes mis à couvert et puis.... je crois que je n'ai pas besoin de l'écrire ! Je m'en souviendrai... Après une demi-heure, nous sommes remontés en voiture et puis nous sommes revenus. J'ai envoyé dénicher les œufs. Je suis remontée et nous avons joué au volant avec Mar. J'ai filé. Est-il nécessaire que je dise tout ? Mon Dieu, que cela m'ennuie... Nous avons été souper... Et puis nous sommes remontés. J'ai chanté, je n'en avais pas grande envie...
 

Mercredi 8. Ce matin, en m'éveillant, je me suis trouvée l'œil enflé. Et ma soeur aussi... Et Mar. aussi... mais c'est charmant. Il est 2 h. au moment où j'écris. On sonne le dîner, je quitte...

Mar. est allé à L. Je n'ai pas quitté mon piano. Je voudrais bien achever mon conte, mais je ne puis pas. Mon Dieu, que je suis bête... Le soir, que de détours il a fallu prendre ! Nous en sommes venus à bout. Je n'ai point chanté.
 

Jeudi 9. Nous avons été, Maman et moi, dans les bois. Quelle délicieuse promenade : un temps couvert, toutes deux mélancoliques, toutes deux le même sujet de peines... O Maman................

 

6         Pierre-Hyacinthe Azaïs (1766-1845)

Journal, inédit
Bibliothèque de l’Institut, Paris
MS 2645, tome IX, folios 36 v°-37 r°
5 vendémiaire (1801)

Mon journal étant devenu presque malgré moi un ouvrage, je me trouve entraîné à donner à chaque article une forme qui me le rend à moi-même agréable. C’est pour cela que je ne suis pas toujours exact sur l’indication du moment où j’écris, et sur les petites circonstances qui interrompraient d’une manière froide et minutieuse une description à laquelle je m’abandonne, ou une discussion que je poursuis.

Il est, par exemple, peu d’articles que j’achève dans l’endroit et le jour même où je les commence. Je suis en train de sentiments et de pensées : cependant le temps me presse, je suis obligé de m’arrêter ; alors je m’arrête, sans arrêter l’article que j’aime à arrondir et à achever convenablement.

Il n’est donc que mes débuts et environ mes sept ou huit premières pages qui répondent exactement à la date. Lorsque je continue, je n’indique plus le moment ni le lieu, à moins que le plaisir de la description ne l’amène. J’en use ainsi maintenant parce que je destine mon journal à faire l’agrément de mon avenir. Et je viens, en ce moment, d’insérer cette note afin de corriger cette inexactitude, dont je pourrais moi-même un jour ne pas me souvenir. Je veux que mon journal autorise ma propre confiance, et pour cela qu’il soit fidèle, ou qu’il me dise en quoi il ne l’est pas.  


Bibliographie 

         Projet « Comment l’intimité est venue au journal » :

Philippe Lejeune et Catherine Bogaert, Le Journal intime. Histoire et anthologie, Ed. Textuel, 2006 (« Les origines », p. 39-98, en particulier « La lettre à soi-même », p. 82-87 ).

Lucile Desmoulins, Journal 1788-1793, texte établi et présenté par Philippe Lejeune, Editions des Cendres, 1995, 168 p.

 « Les journaux spirituels en France du XVIe au XVIIIe siècle », Littérales (Université Paris X Nanterre), n° 33 (Problématiques de l’autobiographie), 2003, p. 63-85.

Marc-Antoine Jullien, Biomètre, présenté par Philippe Lejeune, Editions des Cendres, collection « De trois en trois », 2004, 32 p.

« Un journal d’Azaïs », in De Perec etc., derechef, Mélanges offerts à Bernard Magné, recueillis et présentés par Éric Beaumatin et Mireille Ribière, Paris, Joseph K., 2005, p. 275-285.

 

« “Rien”. Journaux du 14 juillet 1789 », in Le Bonheur de la littérature, Variations critiques pour Béatrice Didier, sous la direction de Christine Montalbetti et Jacques Neefs, P.U.F., 2005, p. 277-284.

« Archéologie de l’intime : Rétif de la Bretonne », dans Métamorphoses du journal, à paraître en 2006 aux éditions Academia Bruylant (Belgique)


Études citées :

Béatrice Fraenkel, La Signature. Genèse d’un signe, Gallimard, 1992.

Sylvie Mouysset, « “Me suis cy soubscrit”. La signature dans les écrits du for privé », La Faute à Rousseau, n° 41, février 2006, p. 28-29.

Au plus près du secret des cœurs ? Nouvelles lectures historiques des écrits du for privé en Europe du XVIe au XVIIe siècle, sous la direction de Jean-Pierre Bardet et François-Joseph Ruggiu, Presses de l’Université Paris-Sorbonne, 2005, 262 p. (Étude de René Favier sur Pierre-Philippe Candy, p. 209-226).